Olivier Meier*
Professeur des universités en sciences de gestion
Université Paris-Est Créteil
*Membre de la faculté du Business Science Institute.
Dans cet entretien, Olivier Meier, professeur à l'Université Paris Est Créteil, membre de la faculté du Business Science Institute et auteur, avec Martine Story, de "Croissance externe des entreprises : Les stratégies d'intégration gagnante", discute des complexités et défis liés aux fusions et acquisitions.
Olivier Meier souligne que malgré des décennies de recherche, l'intégration post-acquisition reste un enjeu complexe et souvent énigmatique. Il commence par rappeler que les fusions et acquisitions (F&A) sont des manœuvres stratégiques complexes impliquant divers facteurs souvent divergents. Elles obéissent à des règles et des temporalités différentes à différents niveaux de l'organisation. Une prise de conscience récente a mis en lumière la variété des situations stratégiques, notamment l'importance croissante des F&A pour des objectifs tels que l'innovation conjointe, ce qui a conduit au développement des acquisitions de symbiose.
Olivier Meier insiste également sur la diversité des acteurs impliqués dans les F&A. Si les dirigeants et les managers sont des figures évidentes, il ne faut pas oublier les collaborateurs dont les attitudes et réactions peuvent influencer les processus, ainsi que tout l'écosystème incluant actionnaires, médias, clients, partenaires et institutions.
Un autre point critique évoqué par Meier est la "guerre des égos" et les rivalités personnelles qui peuvent entraver les F&A. Ces luttes de pouvoir et jalousies injectent une dose d'irrationalité dans des manœuvres qui se veulent rationnelles et stratégiques.
Olivier Meier souligne la remise en cause du modèle rationaliste des F&A, autrefois dominant, influencé par des disciplines comme le droit, l'économie et la finance. Aujourd'hui, les différences culturelles sont reconnues comme des obstacles majeurs, que ce soit au niveau national, organisationnel ou fonctionnel. Le choc des cultures, comme dans le cas emblématique de la fusion Daimler-Chrysler, peut compromettre des projets malgré une pertinence stratégique évidente. Il insiste également sur l'importance de considérer les sous-cultures liées aux métiers, fonctions et divisions spécifiques, qui ajoutent une couche de complexité culturelle aux F&A.
Enfin, Olivier Meier souligne l'importance fondamentale de la variable temps dans les F&A. La croissance externe est souvent privilégiée pour sa rapidité et ses résultats à court terme, mais le processus de création de valeur à long terme peut être beaucoup plus complexe. Il souligne la tension entre la nécessité d'agir vite sous la pression des actionnaires et des médias, et la réalité d'une intégration culturelle et managériale qui demande du temps.
En synthèse, la croissance externe des entreprises comporte un risque de perte significatif et appelle à une réflexion approfondie pour rendre ces stratégies gagnantes. Une prise de recul rendue possible par un recours approfondi aux travaux de recherche.